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MARIANNE ESTRADE

PHILTRES

Dans le court récit de mon expérience vécue avec un cours d’eau dans mon enfance, j’y explique qu’un animal inconnu que je n’avais pas remarqué a glissé sous ma main alors que je la plongeais dans l’eau. J’ai développé depuis une forme de phobie du fond aquatique.
Le point de départ de ce travail se trouve donc autour des notions de profondeur et de strates.
À partir de feuilles plastifiées, d’encre, d’eau et de peinture blanche, noire et bleue, j’ai voulu exprimer ces deux notions d’une manière poétique et transformer cette phobie en une installation presque précieuse.
J’ai tenté d’envahir mon espace personnel avec les feuilles transparentes. Puis, je les ai disposées sur la fenêtre pour que la lumière fasse ressortir les détails des effets de l’eau ainsi que les strates (donc cette notion de profondeur). J’ai constaté que le dispositif faisait un effet vitrail, comme un philtre. J’ai décidé de le laisser en place. En fonction du moment de la journée, de la lumière associée, de la couleur du ciel et de mes habitudes (verre qui se remplit ou qui se vide, lumière intérieure allumée ou éteinte), le philtre réagit différemment. Un soir, à l’occasion d’un orage, le flash des éclairs passait dans le vide de mes plastiques.
J’ai voulu tenter une autre expérience, dans le noir cette fois-ci. À l’aide d’un flash, j’ai éclairé mes feuilles contre un mur pour n’en faire ressortir que la matière. J’ai trouvé le jeu d’ombres et de lumières presque hypnotisant.
Les feuilles ont été posées sur ma fenêtre à nouveau, je la trouvais d’un coup beaucoup trop « vide ». J’aime observer les passants qui en levant la tête se demandent si ces petits rectangles colorés que sont mes plastiques font partie intégrante de ma fenêtre ou s’ils ont été rajoutés.

MARIANNE ESTRADE: TeamMember
MARIANNE ESTRADE: Pro Gallery
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SOUVENIR

« Je devais avoir 5 ou 6 ans, je me promenais dans la campagne non loin des Pyrénées, au bord d’une rivière. J’aimais beaucoup m’assoir près de l’eau, la voir s’écouler, contempler la sérénité et le calme, pencher la tête pour apercevoir les poissons et les libellules. Un élément m’interpelle. En m’approchant, j’aperçois une corde dans l’eau. Dans l’idée qu’on puisse la tirer, j’avance ma petite main. Je n’ai pas le temps de la placer entièrement dessus que sa peau lisse et glissante me file entre les doigts et disparaît dans le léger courant. J’ai compris que ce n’était pas une corde. Ce n’était pas le genre de poisson que je connaissais non plus. Bien qu’ayant pratiqué la natation durant de nombreuses années et adorant la sensation que l’eau procure, une forme d’enveloppe douce et réconfortante ; je crois bien que depuis le jour où j’ai découvert qu’une rivière abritait une faune méconnue et mystérieuse, j’ai contracté une forme de phobie des cours d’eau et des fonds d’eau naturels en général. L’eau est aussi captivante qu’angoissante. »

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